le parti de se destiner à la médecine, le seul état que
puisse embrasser, sans faire aucun sacrifice, un jeune
homme qui veut cultiver les sciences, et à qui la
fortune ne permet pas de garder son indépendance.
Sa famille résolut de l’envoyer à Paris ; mais elle n’était pas riche : le défaut d’argent l’obligea de rester un an au Tremblay, et précisément dans l’âge où le
désœuvrement est le plus dangereux, où cette année
d’oisiveté pouvait décider du sort de sa vie ; il sortit
victorieux de cette épreuve, la plus terrible peut-être
à laquelle un jeune homme puisse être exposé. Il
s’était procuré l’anatomie de Verheinen ; il l’étudia,
la sut bientôt par cœur, et la sut si bien, qu’ayant
eu occasion d’assister à l’ouverture d’un cadavre, les
gens de l’art qu’on avait appelés, obligés d’avoir recours à ses lumières, furent étonnés de le trouver
plus savant qu’eux. Arrivé à Paris, M. Bertin se logea
avec des étudiants en médecine et en chirurgie : séparé
d’eux par une simple cloison, leurs conversations
souvent bruyantes, et qui n’avaient pas toujours
les sciences pour objet, troublaient sa solitude ;
il eut recours à son talent pour l’instruction,
et s’offrit de leur répéter les leçons qu’ils recevaient
ensemble, à condition qu’ils lui laisseraient le temps
de se rendre digne d’être leur maître ; cette offre fut
acceptée, et il obtint de leur reconnaissance la liberté
d’employer à s’instruire les heures qui lui restaient
après les avoir instruits eux-mêmes.
M. Hunauld, de cette Académie, le distingua bientôt parmi ses élèves ; il sut que M. Bertin était Breton comme lui, et devina qu’il devait un jour faire