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ÉLOGE DE M. EULER.


à un grand génie pour les sciences, une philosophie profonde, qui n’accompagne pas toujours ce génie, niais qui sert à lui donner plus d’étendue et à le rendre plus utile : dans ses leçons, il faisait sentir à ses disciples que la géométrie n’est pas une science isolée, et la leur présentait comme la base et la clef de toutes les connaissances humaines, comme la science où l’on peut le mieux observer la marche de l’esprit, celle dont la culture exerce le plus utilement nos facultés, puisqu’elle donne à l’entendement de la force et de la justesse à la fois ; enfin, comme une étude également précieuse par le nombre ou la variété de ses applications, et par l’avantage de faire contracter l’habitude d’une méthode de raisonner, qui peut s’employer ensuite à la recherche des vérités de tous les genres, et nous guider dans la conduite de la vie.

Paul Euler, pénétré des principes de son maître, enseigna les éléments des mathématiques à son fils, quoiqu’il le destinât à l’étude de la théologie ; et lorsque le jeune Euler fut envoyé à l’université de Bâle, il se trouva digne de recevoir les leçons de Jean Bernoulli. Son application, ses dispositions heureuses lui méritèrent bientôt l’amitié de Daniel et de Nicolas Bernoulli, disciples et déjà rivaux de leur père ; il eut même le bonheur d’obtenir celle du sévère Jean Bernoulli, qui voulut bien lui donner, une fois par semaine, une leçon particulière, destinée à éclaircir les difficultés qui se présentaient à lui dans le cours de ses lectures et de ses travaux : les autres jours étaient employés par M. Euler à se