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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/210

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ÉLOGE DE M. DE PRASLIN.


place d’ambassadeur à Vienne. Il était important qu’elle ne fût donnée qu’à un homme dont l’esprit, le caractère, la liberté, inspirassent une entière confiance au ministre qui l’employait ; et cette confiance entière ne peut exister qu’entre des amis qu’une liaison intime a montrés l’un à l’autre, dans cet état d’abandon et de négligence où les hommes ne paraissent que ce qu’ils sont. M. le duc de Choiseul jeta les yeux sur M. de Praslin. Il n’avait qu’un seul moyen de refuser, c’était de trouver un homme digne de remplir cet emploi, à qui son ami put se livrer avec une égale sécurité ; et M. de Praslin mit, pour le trouver, pour faire agréer cet échange au ministre, en un mot, pour ne pas avoir une belle place, autant d’activité qu’un ambitieux en aurait pu mettre pour l’obtenir. Obligé d’accepter enfin, il partit pour Vienne.

« Un ambassadeur, dans une grande cour, a deux grandes tâches à remplir : la première est de bien faire les affaires du souverain qui l’emploie ; de bien connaître les véritables intérêts de sa nation, de ne jamais les perdre de vue, de les soutenir avec une dignité ferme, mais simple et modeste ; de saisir, de susciter même quelquefois les affaires qui peuvent être à l’avantage de sa cour, mais plus souvent de les prévoir pour les prévenir, pour les empêcher de naître ; adresse d’autant plus méritoire, qu’elle reste toujours ignorée, et prive de l’honneur de les avoir terminées. Il faut savoir prendre à propos sur soi, quand le temps ne permet pas de se faire autoriser, et mettre enfin assez