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ÉLOGE DE M. EULER.


quièrent une sorte de grandeur par le rapprochement qu’on en a fait avec la gloire et le génie de l’homme illustre qui les a tracés.

Le roi de Prusse employa M. Euler à des calculs sur les monnaies, à la conduite des eaux de Sans-Souci, à l’examen de plusieurs canaux de navigation. Ce prince n’était pas né pour croire que de grands talents et des connaissances profondes fussent jamais des qualités superflues ou dangereuses, et le bonheur de pouvoir être utile, un avantage réservé par la nature à l’ignorance et à la médiocrité.

En 1750, M. Euler fit le voyage de Francfort pour y recevoir sa mère, veuve alors, et la ramener à Berlin ; il eut le bonheur de l’y conserver jusqu’en 1761. Pendant onze ans elle jouit de la gloire de son fils, comme le cœur d’une mère sait en jouir, et fut plus heureuse encore peut-être par ses soins tendres et assidus dont cette gloire augmentait le prix.

Ce fut pendant son séjour à Berlin, que M. Euler, lié par la reconnaissance à M. de Maupertuis, se crut obligé de défendre ce principe de la moindre action, sur lequel le président de l’Académie de Prusse avait fondé l’espérance d’une si grande renommée. Le moyen que choisit M. Euler ne pouvait guère être employé que par lui ; c’était de résoudre par ce principe quelques-uns des problèmes les plus difficiles de la mécanique : ainsi, dans les temps fabuleux, les dieux daignaient fabriquer, pour les guerriers qu’ils favorisaient, des armes impénétrables aux coups de leurs adversaires.