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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/524

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ÉLOGE DE L'HÔPITAL.

Pour maintenir l’autorité des lois que le duc de Guise violait avec tant d’audace, il fallait armer une faction. Dans ces temps malheureux, à peine restait-il quelques Français qui n’eussent d’autre parti que celui de la patrie. La reine écrit à Coudé de venir défendre le roi et de sauver la France ; mais avant que le prince ait rassemblé ses forces, le duc de Guise l’a prévenu. Certain de l’aveu du connétable et du roi de Navarre, il se rend à Fontainebleau, et


    leur temple ? Croira-t-on que les marchands ou les laboureurs d’un bourg de Champagne aient attaqué les premiers une troupe de soldats commandée par un prince gouverneur de Champagne, et regardé comme un des plus grands capitaines de l’Europe ?

    Ce prince, à qui l’on ne peut refuser de la grandeur d’âme et de la générosité, avait perdu le droit d’être cru sur parole, lorsqu’il avait juré qu’il n’avait aucune part au procès du prince de Condé.

    En vain a-t-on prétendu qu’il protesta, en mourant, de son innocence. Dans ce moment où la nation, lassée de la guerre civile, en détestait les auteurs, ce désaveu, si propre à frapper le peuple, était devenu trop nécessaire à la famille du mourant : et d’ailleurs on aurait peine à reconnaître, dans l’écrit qui fut publié pour lors, le langage d’un héros forcé de se disculper d’un crime.

    Et quand même ce désaveu ne serait pas supposé, doit-il être d’un si grand poids ? Osons le dire : on attache trop de prix aux fastueuses déclarations des mourants. Qui sait jusqu’à quel point ils nourrissent en secret l’espérance de revenir à la vie ? On croit qu’ils n’ont plus aucun intérêt ; comme si ce n’était pas seulement pour les âmes petites et froides que la nécessité de renoncer à tout peut être une raison de ne plus s’intéresser à rien. On fait valoir la crainte d’un juge suprême ; mais cette crainte est-elle donc si puissante dans le cœur de ceux qui ont fait du nom de Dieu l’instrument de leur ambition ?