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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/568

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ÉLOGE DE L'HÔPITAL.


faites sur cet objet ; mais peut-être ce fut moins par la conviction de leur inutilité, que par l’impossibilité d’exciter l’industrie dans un royaume en proie aux guerres civiles : il sentit que ces lois n’étaient qu’un impôt de plus, et il les révoqua.

Il existe une loi qu’il est affreux de voir signée du nom de l’Hôpital, celle qui défend, sous une peine capitale, d’imprimer un livre sans permission. Certes, ici la peine n’est pas en proportion avec le délit ; mais lorsqu’un livre peut allumer la guerre, un livre peut être un crime : dans des temps paisibles, une telle loi eût été le comble de la tyrannie et de l’opprobre ; dans ces temps malheureux, elle pouvait n’être qu’une précaution indispensable.

Il faut plaindre l’Hôpital de s’être cru forcé à cette précaution cruelle ; il faut plaindre cet homme ami des lumières, ami de l’humanité, d’avoir donné une loi qui outrage l’humanité, et qui éteindrait les lumières s’il était au pouvoir des mauvaises lois de les éteindre. Comparons cette loi avec le cœur de l’Hôpital ; voyons ce qu’il a dû lui en coûter pour la signer, combien il fallait qu’il la crût nécessaire, et félicitons-nous de vivre dans un autre siècle.

De toutes les lois de l’Hôpital, celles qui contraignaient trop ou l’intérêt ou les passions des hommes puissants, furent bientôt anéanties : il ne resta que le petit nombre de celles qui faisaient du bien à la nation, sans faire à ses ennemis un mal sensible ; mais du moins il put, dans sa retraite, se rendre ce témoignage si honorable et si doux : Tout ce qui