Toutes les fois qu’un homme, par intérêt personnel, voudrait une chose injuste, c’est-à-dire nuisible à tous, il se trouverait toujours arrêté par la volonté du plus grand nombre ; volonté efficace, puisqu’elle est réunie à la force ; volonté suivie, puisque, en supposant que le plus grand nombre connaisse ses intérêts, il saura combien il lui importe de se réunir. Chacun employant ses forces pour son propre bonheur, et tous employant la force commune pour le bonheur commun, il en résultera, pour la société et pour chaque individu, le plus grand bonheur dont elle soit susceptible.
Ainsi, le bonheur des individus comme tels, le bonheur des individus comme dépendant des lois sociales, sera également d’autant plus sur, que la vérité sera plus connue.
Mais il reste deux objections à résoudre :
1o S’il est utile à un peuple de connaître l’ensemble de toutes les vérités morales et politiques qui influent sur son bonheur, ne peut-il pas être dangereux qu’il connaisse quelques-unes de ces vérités isolées, puisque cette connaissance pourrait le conduire à des erreurs funestes, faute de connaître tous les rapports de ces vérités ? On peut répondre qu’il est impossible de conclure une erreur d’une vérité, sans raisonner faux ; or, tout raisonnement faux suppose une proposition fausse. Ce ne sera donc pas la vérité qui aura conduit à une erreur funeste ; ce sera une opinion fausse qui aura conduit à une fausse conclusion. En second lieu, si de ces vérités isolées, mêlées à quelques erreurs, on tire