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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 5.djvu/50

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Vie de M. Turgot.

payée par chaque communauté, mais toujours libre et réglée par elle seule, rendît volontaire l’engagement du milicien. Cette méthode d’avoir des soldats est en même temps la plus juste, la plus noble, la plus économique, la plus sûre, la plus propre à former de bonnes troupes ; et elle ne peut manquer d’avoir un jour la préférence sur toutes celles que le mépris pour les hommes et le respect pour l’usage ont fait adopter ou conserver.

Le Limousin éprouva, pendant l’administration de M. Turgot, deux années consécutives de disette. Personne n’était plus convaincu que la liberté la plus entière, la sûreté des magasins et des spéculations du commerce, sont le seul moyen de prévenir les disettes et de les réparer. Partout la disette, en élevant le prix, augmente l’intérêt de porter la denrée où elle manque. Mais les lois de police, les ventes forcées, les taxations, ne font qu’opposer des barrières à ce mouvement naturel et enlever cette ressource aux citoyens. Au mal qu’elles font par elles-mêmes, se joint celui d’exposer les commerçants aux vexations des subalternes et à la violence du peuple, dont l’inquiétude et la terreur sont excitées ou nourries par le spectacle d’une législation inquiète et turbulente. Il impute le mal qu’il souffre aux marchands qui viennent à son secours, parce qu’il les regarde comme les agents du gouvernement, ou qu’il les voit l’objet de la défiance des magistrats. Il impute ses maux à ses chefs, parce que la manière dont ils agissent annonce qu’ils croient eux-mêmes avoir le pouvoir de les réparer.