Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/296

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résolu les difficultés qui se sont élevées dans mon esprit ; il faut qu’un maître sache résoudre, et qu’il ait prévu d’avance celles qui peuvent s’élever dans les esprits très dissemblables de ses disciples. Enfin, l’art d’instruire ne s’acquiert que par l’usage, ne se perfectionne que par l’expérience, et les premières années d’un enseignement sont toujours inférieures à celles qui les suivent. C’est donc une de ces professions qui demandent qu’un homme y dévoue sa vie entière ou une grande portion de sa vie : l’état de maître doit être regardé comme une fonction habituelle, et c’est sous ce point de vue qu’il faut le considérer dans ses rapports avec l’ordre social.

Ils ne doivent pas former de corps.

Les maîtres, exerçant des fonctions isolées, ne doivent pas former de corps. Ainsi, non seulement il ne faut ni charger de l’enseignement une corporation déjà formée, ni même en admettre les membres actuels dans aucune partie de l’instruction, parce qu’animés de l’esprit de corps, ils chercheraient à envahir ce qu’on leur permettrait de partager. Cette précaution nécessaire ne suffit pas, il faut que ni les maîtres d’une division du territoire, ni même ceux d’un seul établissement, ne forment une association ; il faut qu’ils ne puissent ni rien gouverner en commun, ni influer sur la nomination aux places qui vaquent parmi eux. Chacun doit exister à part, et c’est le seul moyen d’entretenir entre eux une émulation qui ne dégénère ni en ambition, ni en in-