prépare à lui-même ? Comment sans cela une nation ne resterait-elle pas divisée en deux classes, dont l’une, servant à l’autre de guide, soit pour l’égarer, soit pour la conduire, en exigerait une obéissance vraiment passive, puisqu’elle serait aveugle ? Et que deviendrait alors le peuple ? sinon un amas d’instruments dociles que des mains adroites se disputeraient pour les rejeter, les briser, ou les employer à leur gré.
Je n’ai point la prétention de vouloir changer en publicistes les vingt-quatre millions de citoyens actifs qui, réunis sous une loi commune, veulent être libres de la même liberté ; mais, dans cette science comme dans toute autre, quelques heures d’attention suffisent souvent pour comprendre ce qui a coûté au génie des années de méditation. D’ailleurs, on aurait soin, dans cette instruction, de rapporter aux droits de l’homme toutes les dispositions des lois, toutes les opérations administratives, tous les moyens comme tous les principes ; la déclaration des droits serait l’échelle commune à laquelle tout serait comparé, par laquelle tout serait mesuré. Dès lors on n’aurait plus besoin de ces connaissances étendues, de ces réflexions profondes, souvent nécessaires pour reconnaître l’intérêt commun sous mille intérêts opposés qui le déguisent. Ainsi, en ne parlant aux hommes que de ces droits communs à tous, dans l’exercice desquels toute violation de l’égalité est un crime, on ne leur parlera de leurs intérêts qu’en leur montrant leurs devoirs, et toute leçon de politique en sera une de justice.