Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/452

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mère ; mais si l’instruction publique est générale, étendue ; si elle embrasse l’universalité des connaissances, alors cette inégalité est toute en faveur de l’espèce humaine qui profite des travaux des hommes de génie. Si, au contraire, cette instruction est nulle, faible, mal dirigée, alors l’inégalité n’existe plus qu’en faveur des charlatans de tous les genres, qui cherchent à tromper les hommes sur tous leurs intérêts.

Voilà pourquoi on avait voulu rendre l’instruction publique indépendante de tout autre pouvoir que celui de l’opinion, et ne la soumettre qu’à l’autorité de la renommée. On avait senti que la puissance quelconque à laquelle elle serait subordonnée, chercherait à la faire servir à des desseins étrangers à son véritable objet, la distribution la plus égale, et le progrès des lumières.

On a dit qu’il suffisait d’établir, aux dépens de la nation, des écoles primaires : sans doute on consentirait encore que des écoles fussent ouvertes pour la marine, pour l’artillerie, pour l’art militaire ; car on ne voudrait pas que les enfants des riches pussent seuls y occuper les places. Sans doute on n’ignore pas que cette instruction est le seul moyen de pouvoir se passer d’une grande armée en temps de paix, toujours si dangereuse pour la liberté. Ne faudrait-il pas aussi quelque instruction, pour répandre dans les campagnes des artistes vétérinaires, des sages-femmes plus instruites, des chirurgiens moins ignorants ? Ne sont-ils pas nécessaires, quand ce ne serait que pour éloigner des charlatans plus dangereux ? Mais pour avoir des maîtres qui enseigneront dans ces