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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 8.djvu/47

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d’amérique sur l’europe.

de cet ordre naturel est incalculable. Malheureusement, l’espèce de fureur avec laquelle toutes les nations veulent tout cultiver, tout fabriquer, non pour faire de simples essais, mais dans la vue de ne rien acheter au dehors, prouve combien l’on ignore même aujourd’hui cette utilité d’un commerce étendu et libre.

Indépendamment de cet avantage, les Américains occupant un terrain immense dont une partie n’est pas encore défrichée, ne peuvent être longtemps encore que des cultivateurs : dans un pays libre tout homme, quelle que soit son industrie, préférera nécessairement l’état de propriétaire à tout autre, tant qu’il pourra se flatter de pouvoir y atteindre sans trop sacrifier de son aisance. Ainsi, l’Amérique n’aura longtemps, en général, que des denrées brutes à apporter en Europe, et des denrées manufacturées à y demander. Elle aura peu d’argent à mettre dans le commerce, parce que la plus grande partie des capitaux sera consacrée à la dépense des défrichements, des établissements dans les parties reculées. Elle ne commercera donc avec l’Europe que par des échanges immédiats. Enfin, la seule denrée qu’elle tirera de l’Europe, et qu’elle en tirera longtemps encore, est le vin, une de celles dont l’exportation est la plus avantageuse.

La France paraît en même temps être la nation européenne pour laquelle le commerce avec l’Amérique est le plus important : 1° Parce qu’elle est obligée d’acheter dans le Nord, pour de l’argent, des huiles, des fers, des chanvres, des bois qu’elle se