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Réflexions

année, le logement & la ſubſiſtance à ceux des Negres valides qui, dans cet inſtant de criſe, n’auroient pas trouvé à ſe louer, par un traité libre, à des poſſeſſeurs d’habitations.

A la vérité, on auroit droit d’exiger que les frais de ces établiſſemens fuſſent faits aux dépens des maîtres. Ils doivent des alimens aux Negres qui ont perdu, à leur ſervice, ou leur ſanté, ou la partie de leur vie qu’ils pouvoient donner au travail. Ils doivent des alimens aux enfans, dont les peres morts dans leurs fers, n’ont pu laisser d’héritage. Ils doivent des alimens pour un tems à tous leurs eſclaves, parce que la ſervitude les a empêchés de ſe procurer les avances néceſſaires pour attendre le travail. Ces obligations ſont ſtrictes, indiſpensables ; & ſi le gouvernement s’en chargeoit, à la place des maîtres, ce ſeroit une ſorte d’injuſtice qu’il feroit au reſte de la nation, en faveur des colons, il aggraveroit le fardeau des impôts ſur des innocens, pour épargner les coupables. Auſſi, le ſeul moyen juſte & compatible avec l’état où ſe trouveroient alors les poſſeſſeurs des Nègres, ſeroit un emprunt public, rembourſable par