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sur l’esclavage des Negres

de l’Europe, ou parce que toutes les voies honnêtes d’y trouver de l’emploi leur ſont fermées, ou parce que leur avidité insatiable n’a pu ſe contenter d’une fortune bornée. C’eſt donc à la lie de nations déjà très corrompues, que les Negres ſont abandonnés. Enfin, ſouvent les Negres ſont mis à la torture en préſence des femmes & des filles des colons, qui aſſistent paiſiblement à ce ſpectacle, pour ſe former dans l’art de faire valoir les habitations ; d’autres Negres ont été les victimes de la férocité de leurs maîtres. Plus d’une fois on en a fait brûler dans

    égaux, que les cocos ſeroient distribués également entre tous, & qu’ils périroient ou ſe ſauveroient enſemble. Il n’y avoit que pour treize jours de vivres, la traversée fut de vingt-huit, ils arriverent enfin près de Calicut, à l’embouchure d’une riviere, mourans de faim & de fatigues, leur canot ſe remplit d’eau en paſſant la barre, mais tous furent ſauvés. M. Riviere reprit bientôt ſes forces & ſa ſanté, & continua de ſervir. Lorſque pluſieurs années après on lui faiſoit des queſtions ſur cette aventure & ſur le capitaine qui l’avoit abandonné. J’ai fait vœu dans mon malheur, répondoit-il, de ne parler de lui ni en bien, ni en mal.