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fort éclairée tombe aussitôt sur une autre aussi lumineuse, ni une grande ombre sur une autre ombre de même force. Lorsque l’extrémité d’une draperie claire vient à se terminer sur une autre, c’est d’ordinaire sur l’endroit où il y a une demi-teinte. Ce qui s’observe pareillement dans les parties ombrées, dont les extrémités ne tombent pas sur les ombres les plus fortes. Et c’est ce qui sert à faire détacher les corps, et qui empèche que deux couleurs claires et proches l’une de l’autre ne viennent tout ensemble frapper la vue, et ne confondent les espèces qu’elles envoient. Car ce qui cause cette confusion qui éblouit d’ordinaire les yeux, c’est lorsque trop de parties illuminées sont près les unes des autres ; de même que les ombres, étant confondues ensemble, empêchent qu’on ne distingue pas bien les corps, et font qu’il ne paroît qu’une masse obscure très désagréable. Mais, quand l’on garde une belle économie de couleurs et de lumières, telle qu’elle paroît dans ce tableau, alors l’on donne à son ouvrage cette harmonie et cette union qui font un agréable concert et une douceur charmante dont la vue ne se lasse jamais.


COMMENTAIRE


Cette conférence a été tenue le samedi 3 décembre 1667 dans la salle de l’Académie. Elle est la septième et dernière que Félibien ait publiée, après en avoir « couché le texte par escrit », selon les termes de Testelin.

En 1668, Sébastien Bourdon fit une seconde conférence. Nous avons inutilement parcouru les procès-verbaux de l’Académie pour découvrir la date précise du discours de Bourdon. À maintes reprises, le secrétaire parle des conférences et de l’ordre qu’il convient d’établir dans ces réunions, fort goûtées du public ; mais ce qu’il importerait avant tout de connoître, les noms des orateurs, les sujets traités, Testelin omet d’en rien dire. Nous savons toutefois que Bourdon prit pour sujet de sa conférence l’un des deux tableaux d’Annibal Carrache représentant le martyre de saint Etienne et faisant partie du cabinet du roi. (Ces deux tableaux sont au Louvre)[1] C’est Guillet de Saint-Georges qui

  1. Nos 145 et 146 du catalogue de Frédéric Guillet, édition de 1873.