Aller au contenu

Page:Conrad - Gaspar Ruiz, trad. Néel.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le crains, nous autres jeunes officiers, à d’absurdes témérités et à des risques inutiles.

Pourtant, lentement, pouce par pouce, pour ainsi dire, nos colonnes encerclaient Gaspar Ruiz, bien qu’il eût soulevé contre nous toute la sauvage tribu des Indiens Araucaniens.

Puis, quelque douze ou treize mois plus tard, notre Gouvernement fut avisé par ses agents et ses espions que l’officier rebelle avait scellé une véritable alliance avec Carreras, le soi-disant Dictateur de la soi-disant République de Mendoza, sur l’autre versant des montagnes. Gaspar Ruiz nourrissait-il quelque profond projet politique, ou voulait-il seulement assurer à sa femme et à son enfant un sûr asile, pendant qu’il poursuivrait sans remords contre nous sa guerre d’embuscades et de massacres ? Je ne saurais le dire. Au moins l’alliance était-elle bien réelle. Déjoué dans sa tentative d’opposition à notre marche en avant de la mer, il battit en retraite, avec sa célérité ordinaire, et pour se préparer à une nouvelle campagne rude et hasardeuse, commença par envoyer sa femme avec la fillette par-dessus la chaîne de Pequeña vers la frontière de Mendoza.