Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/117

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veillerai sur elle comme sur un dépôt sacré. Quelle belle et grande mission vous me donnez à remplir ! Combien je tiens à la vie, maintenant que je puis la vouer tout entière à la reconnaissance ?

Mais, après un instant de réflexion, sa physionomie s’assombrit tout à coup ; il fixa sur le chirurgien un regard suppliant, et lui dit :

— Ô mon Dieu, comme ma blessure me pèse maintenant, et que ce lit est douloureux ! Mon digne ami, maître Rogaert, guérissez-moi bien vite, pour l’amour de Dieu, afin que je fasse à mon tour quelque chose pour celle qui m’est venue si affectueusement en aide pendant ma maladie. N’épargnez pas l’argent ; recourez aux herbes les plus précieuses, aux plus nobles pierreries, pour me faire vite quitter ce lit ; car, dès ce moment, il n’y a plus de repos pour moi !

— Messire de Nieuwland, répondit messire Rogaert, il n’est pas possible de hâter la guérison de votre blessure ; il faut toujours du temps à la nature pour réunir les parties violemment séparées. La patience et le repos vous seront plus utiles que les herbes et les pierreries. Mais, écoutez-moi à présent ; il faut que vous connaissiez exactement l’état où est réduit votre pays. Les Français l’occupent tout entier, ils en sont les maîtres, et plus leur domination durera, plus ils deviendront audacieux. Jusqu’ici nous sommes par venus à leur cacher le séjour de la comtesse Mathilde dans cette demeure ; mais il est à craindre qu’il ne