Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/247

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Aussitôt que les Français entendirent ces paroles, ils levèrent la tête en même temps et semblèrent frappés de surprise.

— Écoutez, dit l’un d’eux, c’est la chanson des Klauwaerts ! Témérité ! Ce Flamand ose-t-il la chanter en noire présence ?

Quoique Jean Breydel eût entendu, il n’en continua pas moins sa chanson ; il éleva même la voix comme pour braver les Français.

Sur l’Orient il étendit ses griffes,

Et l’Orient s’enfuit épouvanté.
Son regard seul dispersa les califes,
Et du croissant l’étendard redouté.
Puis il quitta les rivages d’Asie
Et des Flamands pour payer la valeur,
Au plus vaillant des fils de la patrie

Il fit présent d’un sceptre d’empereur.[1]


— Mais que signifie cette chanson qu’ils ont éternellement à la bouche ? demanda Leroux à un Flamand du château qui était assis près de lui.

  1. Dans toutes les guerres qui furent entreprises par les chrétiens, pour conquérir Jérusalem et délivrer le tombeau du Christ, les Belges prirent la plus grande part. Déjà en 1095,
    Godefroi de Bouillon, né au château de Boisy, à quatre lieues de Bruxelles, entra en Palestine avec trois cent mille hommes, et Jérusalem fut prise par eux. En 1204, Beaudoin, comte de Flandre, partit pour l’Orient avec quelques chevaliers français et avec Dandolo, doge de Venise, et vainquit les Turcs dans plusieurs combats. Il fut élu, pour sa bravoure, empereur de
    Constantinople, par tous les alliés.