Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/258

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— Vous, vrais enfants de Bruges, trop longtemps déjà vous avez assez souffert la honte avec moi, vous ne pouvez pas supporter aussi l’esclavage. Mais si vous saviez ce qui m’est arrivé aujourd’hui ! vous pleureriez comme des enfants. Oh ! injure mortelle ! Je n’ose pas le dire, la honte me torture !

Toutes ces figures mâles et brunes s’étaient déjà enflammées du feu de la colère ; ils ne savaient pas encore de quoi ils devaient se fâcher, et cependant ils serraient convulsivement les poings, et des imprécations grondaient dans leurs bouches.

— Écoutez, reprit Breydel, et ne succombez pas sous le poids de la honte, ô mes frères, écoutez bien… Les Français ont frappé votre doyen à la figure ; et cette joue, celle-ci, est souillée d’un soufflet outrageant.

La fureur qui saisit les bouchers à ces paroles ne peut se décrire. Des cris de mort montèrent vers la voûte de la salle, et chacun fit serment de venger cette injure.

— Avec quoi, demanda Breydel, efface-t-on une pareille tache ?

— Avec du sang ! fut le cri général.

— Vous me comprenez, mes frères, reprit le doyen ; oui, le sang seul et la mort des offenseurs peuvent me laver. Sachez que c’est la garnison de Male, qui m’a traité ainsi. Mais, dites-le avec moi : — Le soleil de demain ne retrouvera plus le château à Male !