Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/271

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coursier, il barra le passage au soldat et lui cria, tout en parant avec une merveilleuse adresse les coups des autres assaillants :

— Sur votre corps et votre vie, déposez cette femme à terre ! Sans tenir compte de ces paroles, le soldat détourna son cheval et chercha à sauter hors du chemin ; mais l’épée du chevalier noir tomba sur son casque avec une violence épouvantable et lui fendit la tête jusqu’aux épaules. Deux larges jets de sang jaillirent de la blessure béante et retombèrent en pluie tiède sur la tête et sur la robe blanche de la jeune fille : ses boucles blondes et soyeuses en furent toutes couvertes et se teignirent d’un rouge foncé. Le cavalier tué tomba de sa selle, et, quoique la vie se fût éteinte en lui, les dernières convulsions de ses muscles serraient encore haineusement la jeune fille contre sa poitrine ; mais au bout de quelques minutes les bras du cadavre se détendirent et la jeune femme roula sur le sol avec le mort.

Sur ces entrefaites, le chevalier noir avait encore abattu un autre Français et il ne lui restait plus que trois ennemis ; mais, à mesure que diminuait le nombre des combattants, le combat devenait plus acharné, car la vue du sang fumant enflammait, d’une rage furieuse, ces hommes élevés pour la guerre. Les chevaux, tiraillés de droite à gauche, hennissaient à chaque coup qui tombait sur leur cuirasse de fer. La jeune fille était étendue sans connaissance sous leurs pieds : comme elle était tombée de la selle la