Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelque aliment[1]. Heureusement pour eux que les soins des léliards remédièrent en partie à cet état de choses ; mais une cruelle disette n’en continua pas moins de régner dans la ville. Les maisons des klauwaerts étaient fermées ; il n’y avait plus le moindre commerce, et tout, à l’exception des soudards irrités et des lâches léliards, tout, à Bruges, semblait endormi d’un éternel sommeil. Les gens des métiers, se trouvant sans ouvrage, ne pouvaient payer l’impôt et étaient forcés de se cacher pour échapper aux poursuites de maître Jean de Gistel. Quand les agents du fisc faisaient leur tournée, le samedi, pour recevoir le penning d’argent, ils ne trouvaient jamais personne au logis ; on eût dit que tous les Brugeois avaient abandonné la ville. Beaucoup de gens des métiers se plaignirent à Jean de Gistel, alléguant que, ne gagnant rien, ils ne pouvaient payer l’impôt ; et le Flamand abâtardi n’écouta pas cette excuse si légitime et voulut recourir à la force pour faire rentrer l’impôt ; un grand nombre de personnes furent jetées en prison, d’autres furent même mises à mort.

Messire de Mortenay, gouverneur français de la ville et commandant de la garnison, moins cruel que le collecteur des impôts, voulut, dans cette situation extrême, faire diminuer ceux-ci, et, dans ce but, il envoya à Courtray un messager chargé d’in-

  1. Voir l’Excellente chronique de Flandre.