Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/359

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je veux me rendre aujourd’hui à Bruges, quelque périlleuse que soit la démarche.

— Mais, dit un des doyens, comment pénétrerons-nous en ville demain, puisque les portes sont fermées avant le lever du soleil ?

— Les portes s’ouvriront pour nous, répondit de Coninck ; je ne reviendrai de la ville que lorsque la vengeance sera assurée et infaillible. Je vous en ai dit assez : demain, au lieu fixé pour la réunion, je vous communiquerai d’autres ordres ; tenez vos hommes prêts. Je vais partir avec la jeune comtesse ; il ne faut pas qu’elle soit témoin de cette scène sanglante.

Durant ce discours, Breydel n’avait pas donné le moindre signe d’assentiment ; mais une joie sauvage rayonnait sur son visage. Dès que les doyens se furent retirés, il se jeta au cou de de Coninck et dit, tandis que deux larmes coulaient sur ses joues :

— Vous m’avez arraché à mon désespoir, mon excellent ami, maintenant je pourrai pleurer tranquillement sur les corps de ma mère et de ma sœur, et les rendre religieusement à la terre. Et alors, quand la tombe se sera refermée sur elles, que me restera-t-il donc à aimer sur la terre ?

— Votre patrie et son exaltation ! répondit de Coninck.

— Oui, oui, la patrie, la liberté… et la vengeance ! car maintenant, voyez-vous, mon ami, je pleurerais de rage si les étrangers quittaient notre pays… ma