Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/426

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nouveaux fers, tous les démons de l’enfer ne seront pas capables de leur ravir de nouveau la liberté ; mais c’est ce dont je doute fortement.

— Expliquez-vous, messire Didier, s’écria Guy ; expliquez-nous votre pressentiment et ne nous inquiétez pas par d’incompréhensibles paroles.

— Eh bien, je vous annonce que soixante-deux mille Français sont campés devant la ville de Lille[1].

— Soixante-deux mille ! répétèrent les chevaliers en se regardant les uns les autres avec inquiétude.

— Soixante-deux mille ! répéta aussi Breydel en se frottant les mains de joie, ô mon Dieu, quel beau troupeau !

De Coninck pencha la tête et tomba dans une profonde préoccupation ; c’était ce que faisait toujours le sage doyen des tisserands dans les circonstances critiques. Il mesurait alors la gravité du danger et les moyens de le détourner.

— Je vous assure, messires, reprit Didier Devos, qu’il y a plus de trente-deux mille cavaliers et au moins autant de fantassins. Ils pillent et brûlent comme s’ils devaient gagner le paradis par là.

— Êtes-vous bien sûr de cette mauvaise nouvelle, demanda Guy ; celui qui vous a dit cela ne vous a-t-il pas trompé, messire Didier ?

  1. Les historiens varient beaucoup dans leur estimation des forces de l’armée française : nous avons pris une moyenne entre les différentes versions.