Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/504

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dents se serraient convulsivement, une soif ardente desséchait leur bouche, et la respiration de leurs poumons oppressés était courte et pénible. Un silence effrayant planait sur l’armée ; personne ne communiquait ses émotions aux autres, car tous étaient absorbés par de sombres et lugubres préoccupations. Depuis quelque temps déjà, ils étaient rangés en longue ligne de bataille, lorsque le soleil apparut à l’horizon et leur permit de voir l’armée française.

Les cavaliers étaient en si grand nombre, qu’un champ de blé compte des épis moins nombreux que les lances qui étincelaient au-dessus des rangs ennemis. Les chevaux des premiers rangs frappaient du pied avec impatience, et couvraient de blancs flocons d’écume leurs caparaçons de fer. Les trompettes envoyaient leurs accents comme un joyeux appel de fête aux échos du Neerlanderbosch[1], et le vent se jouait capricieusement dans les plis ondoyants des pennons et des bannières. La voix des chefs venait de temps en temps dominer ces bruits belliqueux, tandis que le cri de guerre : — Noël ! Noël ! France ! France ! s’élevait par intervalles et dominait tout le reste. Les chevaliers français étaient impatients et pleins d’ardeur ; ils stimulaient leurs chevaux de la pointe de l’éperon, puis ils les caressaient et leur

  1. Bois néerlandais.