puis l’audience que son père avait eue avec le roi, tous les seigneurs français redoublaient d’affabilité et d’égards envers les Flamands. Ceux-ci croyaient y voir une preuve des bonnes dispositions du roi : ils savaient que les projets et les pensées du prince se réfléchissent sur la physionomie mobile des courtisans.
Le comte de Châtillon, lui-même, avait plusieurs fois rendu visite au comte Guy et lui avait offert ses félicitations ; mais il gardait au fond du cœur une haine implacable, et il la dissimulait sous un sourire. Jeanne de Navarre, sa nièce, lui avait promis le pays de Flandre en fief : ses ambitieuses intrigues avaient toujours eu pour but la possession de ce riche comté, et cette réconciliation faisait évanouir comme un songe cette riche perspective.
Il n’est pas de passion qui dispose davantage l’homme au mal que l’ambition. Elle brise impitoyablement tout ce qui entrave sa marche, et ne se retourne pas pour voir les crimes déjà commis, parce que son œil est obstinément fixé sur le but qu’elle poursuit. Le comte de Châtillon, esclave de cette passion fatale, résolut de mettre à exécution un dessein perfide que lui avait inspiré l’égoïsme seul, et que sa conscience perverse se plut à parer du nom sacré de devoir.
Le jour même où il était arrivé de Flandre à la cour, avec les autres seigneurs, il appela l’un de ses plus fidèles serviteurs, lui donna son meilleur cheval et