Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/371

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le vieillard. Elle devient gourmande, recherchée dans ses habits, dépensière…

— Si je le vois ; oncle Jean ! Je vous en parle rarement, car Cécile est ici l’enfant gâté ; elle peut faire tout ce qu’elle veut : manger du beurre, porter de belles robes, faire flamber le feu, donner de l’argent ! J’ai pitié de vous, oncle Jean, et je tremble quand je songe au mal qui peut vous arriver de votre aveugle affection pour elle ; et pourtant j’ai pitié davantage encore de notre pauvre Cécile qui, débauchée comme elle l’est, prend peu à peu la mauvaise route.

— Combien reste-t-il encore du beurre que tu as acheté la semaine dernière ? demanda l’oncle perdu dans ses réflexions.

— La demi-livre est encore une fois finie !

— Finie ? Il nous faudra donc encore un demi-franc d’argent pour suffire à son gaspillage ? Mon Dieu ! mon Dieu !

— Demain, oncle Jean.

Mathias vit avec une joie dissimulée le vieillard porter les mains à son front avec désespoir et tous ses membres se contracter convulsivement. Un sourire étrange courut sur son visage rébarbatif ; — il reprit :

— Oui, croyez-moi ou ne me croyez pas, oncle Jean, mais je dis la vérité. Cécile est pervertie jusqu’au fond par la mère Anne. Ils lui donnent dans cette maison toutes sortes de friandises, ils font un feu à brûler la cassine, et ils se moquent de nous pour lui inspirer de la haine à notre endroit. Si Cécile est toujours dehors et se conduit comme si l’argent pleuvait chez vous, c’est la