Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/376

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— Ce sont des langues venimeuses, oncle Jean ! Ne vous en inquiétez pas davantage, pourvu que vous réussissiez à sauver notre malheureuse Cécile de leurs piéges.

— Oui, notre Cécile… et mon pauvre argent ! dit le vieillard en soupirant. Ah ! Mathias, si j’étais jeune, je me ferais prodigue, dépensier, libertin !… Mais non, je finirais encore par mourir de faim.

Un court silence suivit cette exclamation. Le vieillard semblait saisi de la fièvre et était visiblement tourmenté par de sinistres prévisions.

— Calmez-vous et reprenez courage, oncle Jean, dit Mathias d’une voix consolante ; ils n’en sont pas encore là, les odieux trompeurs. Cécile ne soupçonne peut-être pas le moins du monde leurs mauvais desseins. La pauvre fille est séduite ! Elle est au bord de l’abîme, c’est vrai, et pourtant soyez sûr qu’avec de la bonne volonté et une ferme résolution on peut encore la sauver facilement.

L’oncle fixa sur lui un œil plein d’espérance, et dit d’une voix suppliante :

— Ah ! pour l’amour de Dieu, mon ami, conseille-moi ce que je dois faire ; mon âme est faible et le chagrin me trouble l’esprit…

— C’est bien simple, oncle Jean. Voulez-vous empêcher Cécile d’épouser maintenant ou après votre mort un dissipateur ? eh bien, donnez-lui un mari économe qui puisse la rendre heureuse…

— Un mari économe ! répéta le vieillard en réfléchissant, en effet !