taires produisirent les commissions militaires de fructidor de la même année, et ces dernières ont produit les tribunaux militaires du mois de ventôse an V[1]. Je ne discute point ici la légalité ni la compétence de ces tribunaux. Je veux seulement prouver qu’ils s’autorisent et se perpétuent par l’exemple ; et je voudrais qu’on sentît enfin qu’il n’y a, dans l’incalculable succession des circonstances, aucun individu assez privilégié, aucun parti revêtu d’une puissance assez durable pour se croire à l’abri de sa propre doctrine, et ne pas redouter que l’application de sa théorie ne retombe tôt ou tard sur lui. »
Lorsque Bonaparte proposa ses tribunaux spéciaux, en les faisant appuyer de raisonnements qui nous ont été reproduits la session dernière, voici encore ce que j’écrivais :
« Tribuns, ouvrez, je ne dirai pas seulement les cahiers des états-généraux de 1789 ; mais toutes les doléances présentées par les assemblées précédentes, à chaque époque où elles ont pu faire entendre leur faible voix : vous y verrez que la nation entière a toute jours réclamé contre la création de tribunaux différents des tribunaux ordinaires. Cette opinion s’est manifestée sans cesse avec une force toujours renaissante, et que le despotisme a pu comprimer, mais jamais réduire au silence. C’est l’opinion la plus nationale qui ait existé parmi les Français.
- ↑ Des hommes, que l’on appelait terroristes, furent traduits devant les commissions militaires du mois de mai 1795 ; des hommes, qu’on appelait royalistes, devant les conseils militaires du mois d’octobre de la même année ; des terroristes devant les tribunaux militaires du mois de mars suivant ; des royalistes devant les commissions du mois de juillet.
Qui peut nier qu’il n’eût mieux valu, pour tous les partis, s’en tenir aux tribunaux ordinaires ?