qu’il y avait d’agréable aux dieux, dans les prières, c’était que l’air, frappé par le mouvement des lèvres, leur prouvât sans cesse que l’homme s’occupait d’eux. En conséquence ces peuples ont inventé de petits moulins à prières, qui, agitant l’air d’une certaine façon, entretiennent perpétuellement le mouvement désiré ; et pendant que ces moulins tournent, chacun, persuadé que les dieux sont satisfaits, vaque sans inquiétude à ses affaires ou à ses plaisirs. La religion, chez plus d’une nation européenne, m’a rappelé souvent les petits moulins des peuples mogols.
La multiplication des sectes a pour la morale un grand avantage. Toutes les sectes naissantes tendent à se distinguer de celles dont elles se séparent par une morale plus scrupuleuse, et souvent aussi la secte qui voit s’opérer dans son sein une scission nouvelle, animée d’une émulation recommandable, ne veut pas rester dans ce genre en arrière des novateurs. Ainsi l’apparition du protestantisme réforma les mœurs du clergé catholique. Si l’autorité ne se mêlait point de la religion les sectes se multiplieraient à l’infini ; chaque congrégation nouvelle chercherait à prouver la bonté de sa doctrine, par la pureté de ses mœurs : chaque congrégation délaissée voudrait se défendre avec les mêmes armes. De là résulterait une heureuse lutte où l’on placerait le succès dans une moralité plus austère : les mœurs s’amélioreraient sans efforts, par une impulsion naturelle et une honorable rivalité. C’est ce que l’on peut remarquer en Amérique, et même en Écosse où la tolérance est loin d’être parfaite, mais où cependant le presbytérianisme s’est subdivisé en de nombreuses ramifications.
Jusqu’à présent la naissance des sectes, loin d’être accompagnée de ces effets salutaires, a presque tou-