Page:Constant - Œuvres politiques, 1874.djvu/318

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    partage des biens, pour que les trois quarts des voix lui soient enlevés. Là, il suffit de dire : c’est un jésuite, c’est un blanc, il vous ramènera la dîme. L’ignorance des faits les plus importants eux-mêmes est poussée si loin, qu’en 1873 nous avons vu, à quarante lieues de Paris, des individus notables d’un quartier industriel, dans une ville de vingt mille âmes, venir nous annoncer avec un profond sentiment de tristesse qu’une révolution venait d’éclater à Paris, qu’on avait voulu prendre l’Hôtel de ville et fusiller le général Trochu. Les bonnes gens venaient de lire un journal de 1871 qui leur était par hasard tombé sous la main ; ils n’avaient point regardé la date ; de là leur inquiétude au sujet des dangers qu’avait courus le général Trochu. D’autres dans la même ville, lors de la revue de l’armée allemande passée à Longchamps, se sont imaginé que Napoléon III était revenu à Paris, parce qu’ils avaient lu dans les journaux que l’empereur et le prince impérial assistaient à cette revue. Ils ne s’étaient pas douté le moins du monde qu’il s’agissait de l’empereur d’Allemagne. Ceux-là étaient pourtant l’élite des électeurs du quartier, les abonnés des journaux de la localité.

    (Note de l’éditeur.)