Page:Constant - Adolphe.djvu/13

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« Chaque fois que je verrai se fermer devant moi les portes d’une maison joyeuse, loin de pleurer sur mon isolement, je m’applaudirai, dans le silence de ma pensée, du choix glorieux de mon cœur ; et comparant le mensonge de cette fête à la fête perpétuelle de mon amour, je les plaindrai sincèrement de n’avoir pas comme moi le vrai bonheur.

« Tous les soirs, en me souvenant de la journée accomplie, en prévoyant la journée prochaine, je bénirai la sérénité harmonieuse de ma destinée, et sur les plaisirs tumultueux des autres femmes j’abaisserai un regard de pitié. Car ma vie se partage entre la prière et le dévouement ; et leur route est si bien frayée, qu’elles vous oublient, ô mon Dieu !

« Permettez seulement que je lui sois présente à chaque heure du jour ; permettez qu’il ne souhaite rien au delà de mon amour, et qu’il ne regarde pas en arrière ; faites qu’il vive tout en moi, comme je vis tout en lui. »

Mais un jour la mesure du sacrifice était comblée : elle a douté de la reconnaissance qu’elle avait méritée ; l’inquiétude a rongé le fruit de son amour. Elle a pleuré, et ses larmes n’ont pas été essuyées ; elle s’est affligée de