Page:Constant - Adolphe (Extraits de la correspondance), 1960.djvu/47

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seriez pas en bravant le monde, en sacrifiant le fruit d’une lutte difficile, en vous entourant d’une défaveur qui vous serait insupportable, et pour laquelle moi, contre lequel tant de haines s’agitent, tant de chances de proscription sont possibles, et qui ne puis vous offrir ni l’éclat d’une fortune qui achèterait l’approbation, ni celui d’un nom qui la commande, je ne vous donnerais aucune sauvegarde réelle, aucun durable dédommagement. Anna, je vous aime profondément. Ne me jugez pas injustement et demandez-vous, après m’avoir lu, si vous pouvez ne pas m’estimer. Songez que cette lettre est écrite à la hâte, sans être relue, et ne vous arrêtez pas à quelques mots, mais à l’intention. A ce soir.

XIX. Benjamin Constant à Madame Lindsay La Grange, ce 29 floréal an IX [I9 mai 1801].

Je ne vous écris que deux mots : je ne sais dans quelles dispositions vous êtes ; mais je voudrais que vous ne fussiez pas injuste, que votre injustice ne vous fît prendre aucune résolution violente ou précipitée, et que vous ne fissiez rien d’irréparable jusqu’à ce que je vous eusse vue, et que nous nous fussions bien expliqués et bien compris. J’ai un sentiment