Page:Constant - Adolphe (Extraits de la correspondance), 1960.djvu/51

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est-ce d’être aimé de moi ? Que vous demandais-je de plus ? Il y a quelques jours, lorsque je vous écrivis que je vous abandonnais ma vie, que je me résignais, que je faisais le sacrifice du seul genre de vie dans lequel je puisse trouver le bonheur complet, avez-vous pensé que je me soumettrais à l’insulte, et à n’être que l’instrument commode de vos plaisirs ? Je ne voulais pas de coup de tête. Je voulais, avec autant de bonheur que votre amour pouvait m’en donner, attendre que le temps eût en quelque sorte légitimé cette nouvelle union, mais je n’ai pas compris un moment que vous ne relâcheriez pas vos rapports avec une autre. Jusqu’à quel point vous avez cru pouvoir abuser de mon délire ! Comme vous avez bravé ma douleur ! et enfin en la poussant à l’extrême, vous avez bouleversé complètement mon existence !… Vous seriez bien heureux d’avoir à vous faire pardonner ce que vous appelez « des folies de l’amour ». On ne vous juge pas assez favorablement pour vous croire capable d’en faire. Mais je pars, et je m’effraie de l’effort cruel que j’ai fait sur moi-même. Maintenant, quelle que soit ma faiblesse, c’est un devoir que de partir. Je veux bien essayer de vaincre mon amour, mais qui a le droit de m’en imposer la loi ? Il faudrait désormais opter entre vous et un autre. Je ne calcule pas, je n’ai pas de vanité, de considération honteuse qui me retiennent. Je puis vous