Page:Constant - De l'esprit de conquête, Ficker, 1914.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme des complices de l’ennemi étranger : elle déprave les générations naissantes ; elle divise le peuple en deux parts, dont l’une méprise l’autre, et passe volontiers du mépris à l’injustice ; elle prépare des destructions futures par des destructions passées ; elle achète par les malheurs du présent les malheurs de l’avenir.

Ce sont là des vérités qui ont besoin d’être souvent répétées ; car l’autorité, dans son dédain superbe, les traite comme des paradoxes, en les appelant des lieux communs.

Il y a d’ailleurs parmi nous un assez grand nombre d’écrivains, toujours au service du système dominant, vrais lansquenets, sauf la bravoure, à qui les désaveux ne coûtent rien, que les absurdités n’arrêtent pas, qui cherchent partout une force dont ils réduisent les volontés en principes, qui reproduisent toutes les doctrines les plus opposées, et qui ont un zélé d’autant plus infatigable qu’il se passe de leur conviction. Ces écrivains ont répété à satiété, quand ils en avoient reçu le signal, que la paix étoit le besoin du Monde ; mais ils disent en même temps que la gloire militaire est la première des gloires, et que c’est par l’éclat des armes que la France doit s’illustrer. J’ai peine à m’expliquer comment la gloire militaire s’acquiert autrement que par la guerre, ou comment l’éclat des armes se conci-