Page:Constant - La Druidesse.djvu/26

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Ou ton cœur agité palpite-t-il encor
De ta dernière tâche au rivage du Mor ?
Ou n’est-ce que l’effet de ta course hâtée ?
Ton âme avoir peur ? non ! elle est trop réputée
Pour son courage mâle, et l’oubli du danger.
La fatigue est sur toi le souffle passager ;
Et ton robuste corps a l’haleine puissante.
Non, non, Bélisana, chevrette frémissante,
Ni fatigue ni peur ne soulèvent ton sein :
C’est l’amour qui l’agite, ainsi que le dessein
D’ensevelir le tien au fond de ton cœur même.
Oh ! oui, je te comprends ! Lorsque celui qu’on aime,
Dans l’ombre, à quelques pas, est là qui vous attend ;
Quand le zéphir des nuits murmure, et qu’on l’entend ;
Fût-on même prêtresse, on tremble et l’on frissonne ;
Et pour un peu le cœur sans réserve se donne !
Du tien contiens les bonds si tu les veux cacher !
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Elle arrive au Dolmen, et là, près d’un rocher
S’arrête, hésite : enfin rassemblant son courage,
Comme un aigle qui lutte et fait tête à l’orage :
« Au gui l’an neuf, » dit-elle, et trois coups espacés,
Par ses fébriles mains dans le calme lancés,
Achèvent le signal du rite druidique.
Elle écoute ; et soudain, comme un lieu fatidique,
La tombelle répond du fond de ses parois.
« Au gui l’an neuf » redit une sonore voix ;
Et deux puissantes mains ébranlent les échos :
Leur triple battement termine les signaux.
A trois pas du rocher, Bélisana s’avance ;
Devant elle aussitôt, à vingt pas de distance,
La tombelle vomit deux robustes guerriers.
Quels fronts pleins de noblesse et dignes des lauriers !