Page:Constant - Le Cahier rouge, éd. Constant de Rebecque.djvu/100

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’acceptai donc, et je partis, me promettant bien de ne plus faire d’équipée semblable. Par un reste de goût pour les expéditions chevaleresques, je voulus aller à franc étrier jusqu’à Douvres. C’est une manière de voyager qui n’est pas d’usage en Angleterre, où l’on va aussi vite et à meilleur marché en chaise de poste. Mais je croyais indigne de moi de n’avoir pas un cheval entre les jambes. Le pauvre chien qui m’avait fidèlement accompagné dans toutes mes courses fut la victime de cette dernière folie. Quand je dis dernière, je parle de celles que je fis en Angleterre d’où je partis le lendemain. Il succomba à la fatigue à quelques milles de Douvres. Je le confiai presque mourant à un postillon avec un billet pour Kentish, dans lequel je lui disais que, comme il traitait ses amis comme des chiens, je me flattais qu’il traiterait ce chien comme un ami. J’ai appris plusieurs années après que le postillon s’était acquitté de ma commission et que Kentish montrait le chien à un de mes cousins qui voyageait en Angleterre, en lui disant que c’était un gage de l’amitié intime et tendre qui le réunissait pour toujours à moi. En 1794, ce Kentish s’est avisé de m’écrire