Page:Contes allemands du temps passé (1869).djvu/65

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« Aussi, dit l’homme, qui diable va se mettre au coin du marché avec de la poterie ? Je vois maintenant que tu n’es propre à rien ; je suis allé au château du roi et j’ai demandé si l’on n’avait pas besoin d’une servante de cuisine. On m’a promis de te prendre : tu gagneras ta nourriture. »

Ainsi, la fille du roi devint servante de cuisine : elle aidait le cuisinier et faisait l’ouvrage le plus dur. Elle attachait dans chacune de ses poches un petit pot où elle emportait les restes qu’on lui donnait et elle en vivait au logis avec son mari.

L’époque arriva où les noces du prince aîné devaient être célébrées. La pauvre femme monta jusqu’à la salle et se mit à regarder par la porte. Les bougies s’allumèrent ; les invités firent leur entrée l’un après l’autre, splendidement parés lorsqu’elle vit toute cette pompe et toute cette richesse, elle eut le cœur gros de larmes et elle maudit son orgueil et son insolence qui l’avaient réduite à cet état de pauvreté et de misère.

Les serviteurs lui donnaient parfois un peu des mets délicieux qu’ils allaient servir sur la table : elle les mit dans ses petits pots pour les emporter. Tout à coup, le fils du roi paré de chaînes d’or vint à passer, et quand il vit cette belle personne à la porte, il lui prit la main et voulut danser avec elle ; mais elle s’y refusa ; car elle avait reconnu le roi Grive qui l’avait demandée en mariage et dont elle s’était tant moquée. Elle résista, il l’entraîna ; les ruhans se dénouèrent et les pots tombèrent par terre, de sorte que le potage et les miettes se répandirent sur le plancher. À cette vue, on éclata de rire, on la railla et la pauvre femme aurait voulu être à cent pieds sous terre. Elle essaya de s’échapper par la porte ; mais, dans l’escalier, un homme l’atteignit et la ramena