Page:Contes des Fées, par Perrault, Mme D’Aulnoy, Hamilton et Mme Leprince de Beaumont, 1872.djvu/266

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Elle leva les yeux au ciel : elle pleura encore, et puis elle entra dans sa chambre.

Elle la trouva toute parfumée, et ne doutant point que ce ne fût l’odeur de ses œillets, elle s’en approcha tristement, et leur dit : « Beaux œillets, dont la variété me fait un extrême plaisir à voir, vous qui fortifiez mon cœur affligé, par ce doux parfum que vous répandez, ne craignez point que je vous laisse manquer d’eau, et que d’une main cruelle, je vous arrache de votre tige ; j’aurai soin de vous, puisque vous êtes mon unique bien. » En achevant ces mots, elle regarda s’ils avaient besoin d’être arrosés : ils étaient fort secs. Elle prit sa cruche, et courut au clair de la lune jusqu’à la fontaine, qui était assez loin : comme elle avait marché vite, elle s’assit au bord pour se reposer ; mais elle y fut à peine, qu’elle vit venir une dame, dont l’air majestueux répondit bien à la nombreuse suite qui l’accompagnait : six filles d’honneur soutenaient la queue de son manteau ; elle s’appuyait sur deux autres ; ses gardes marchaient devant elle, richement vêtus de velours amarante, en broderie de perles ; on portait un fauteuil de drap d’or, où elle s’assit, et un dais de campagne, qui fut bientôt tendu ; en même temps on dressa le buffet, il était tout couvert de vaisselle d’or et de vases de cristal. On lui servit un excellent souper au bord de la fontaine, dont le doux murmure semblait s’accorder à plusieurs voix, qui chantaient ces paroles :

Nos bois sont agités des plus tendres zéphirs,
Flore brille sur ces rivages ;