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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/187

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CONTES SECRETS RUSSES

veillée. Le berger vint se jeter à ses genoux : « Grand’mère, » commença-t-il, « fais en sorte que je prie éternellement Dieu pour toi, et je ne t’oublierai pas, tant que je vivrai. » Ensuite il lui raconta ses ennuis et lui donna un rouble d’argent. « C’est bien, mon ami, viens à la chute du jour. » Le soir, le berger ramena son troupeau des champs ; il pleuvait un peu ; les femmes se mirent, elles aussi, en devoir de faire rentrer leurs bestiaux ; Dounia, entre autres, courut chercher sa vache. La vieille l’aperçut par la fenêtre et lui cria : « Dounia, Dounia, viens donc ici ! » La jeune fille entra aussitôt et la vieille commença à l’admonester sévèrement, tandis que le berger était chez elle, caché derrière le poêle : « Prends-y garde, Douniacha, tu t’en repentiras quand il sera trop tard ! » Ces paroles effrayèrent Dounia, qui ne savait de quelle faute elle s’était rendue coupable. « Les folles, les imprudentes jeunesses que vous êtes ! » poursuivit la vieille : « Vous courez étourdiment, vous sautez les fossés sans penser à rien ! Qu’est-ce que vous gagnez à agir ainsi ? Vois un peu, sotte, ce que tu as fait maintenant : tu as endommagé ton honneur ! Qui voudra t’épouser ? — Ah ! grand’mère, n’y a-t-il pas moyen de le raccommoder ? — Heu ! le raccommoder ! Pour tout, c’est toujours à la grand’mère qu’on s’adresse ! Allons, viens ici, fais ce que je te dirai et arme-toi de courage, car l’opération sera douloureuse. — Bien, grand’mère ! — Regarde par la fenêtre