LXVIII
NICOLAS L’ERMITE
n vieux paysan avait une jeune femme. Chez
elle venait souvent en visite un jouvenceau,
Térékha Gladkoï. Le vieillard en eut connaissance
et dit à sa femme : « La maîtresse ! J’ai été au bois
et j’y ai trouvé Nicolas l’ermite ; quoi que tu lui
demandes, il te l’accordera ! » Le lendemain matin,
lui-même courut au bois, il y trouva un vieux
pin et s’introduisit dans le creux de cet arbre. La
femme se mit à la besogne et, après avoir fait bon
nombre de pâtés, de petits pains ronds et de blines
savoureux, elle alla au bois pour invoquer Nicolas
l’ermite. Arrivée près du pin, elle aperçut le vieillard :
« Voilà Nicolas l’ermite ! » pensa-t-elle, et
elle se mit à le prier : « Batouchka Nicolas, fais
que mon mari devienne aveugle ! — Retourne
chez toi, femme, » répondit le vieillard, « ton
mari perdra la vue, mais laisse ici tes pâtés. » La
paysanne déposa sa corbeille au pied de l’arbre et
revint chez elle. Aussitôt le vieillard sortit de sa
cachette, mangea les pâtés, les petits pains et les
blines, puis se coupa un gourdin et reprit le chemin
de sa demeure. Il arriva, marchant à tâtons,
comme un aveugle. « Pourquoi vas-tu si douce-