Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/168

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habits à ma portée ! Partez maintenant, et si l’officier qui commande ces dragons venait à me demander, faites-lui mes compliments et dites-lui que je vais descendre.

Lorsque le domestique fut parti, le capitaine, tout en faisant sa toilette, prononça à diverses reprises le monologue suivant :

— Je gagerais ma commission contre une demi-paie d’enseigne que quelqu’un de ces paresseux à qui il faut un quadrupède pour les porter, a entendu parler du vin de la Caroline. Mais je crois qu’il faut que je mette une annonce dans la gazette de Londres, pour demander raison de sa conduite à ce capitaine amphibie. Si c’est un homme de cœur, il ne se cachera pas sous son incognito, et il me donnera un rendez-vous. Si cette mesure ne me réussit pas, morbleu ! je me rendrai à Yarmouth, et je ferai payer tout au premier de cette race de métis qui me tombera sous la main. Par la mort ! jamais un homme comme il faut, jamais un militaire n’ont été insultés de cette manière. Si je savais seulement son nom ! Que cette histoire vienne à s’ébruiter, je deviendrai le plastron des railleries de tous mes camarades, jusqu’à ce qu’ils trouvent à s’amuser aux dépens d’un plus grand fou que moi. Il me faudrait au moins six duels pour les faire taire. Mais non, non ; je ne veux pas qu’il se brûle une amorce dans mon régiment pour cette affaire : j’en ferai payer les frais à quelque officier aquatique. Cela n’est que juste et raisonnable. Et ce Peters ! si le coquin s’avise de dire un seul mot de la manière dont il s’est laissé battre avec son propre mousquet… Je ne puis le faire passer par les verges pour cela ; mais si je ne m’en dédommage pas la première fois qu’il m’en fournira l’occasion, je n’entends rien à la manière dont on balance les comptes dans un régiment.

Lorsqu’il eut terminé ce soliloque, qui peut donner une idée assez juste du cours que prenaient ses pensées, l’officier de recrutement ayant achevé sa toilette, se disposa à aller joindre les nouveau-venus, comme il croyait que son devoir l’exigeait. En arrivant dans la cour, il rencontra son hôte qui était en conversation assez animée avec un jeune officier de cavalerie ; le colonel l’interrompit pourtant pour s’adresser à Borroughcliffe.

— Bonjour, mon digne gardien, mon brave protecteur. J’ai de belles nouvelles à faire entendre à votre loyauté. Il paraît que nos prisonniers sont des gens déguisés, des ennemis du roi ; et le cornette Fitzgerald… Capitaine Borroughcliffe, permettez-moi