Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/186

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Quelques questions sur le lieu et sur l’année de leur première entrevue convainquirent Mrs Wilson que c’était bien Egerton dont la passion désordonnée avait causé une si vive frayeur à Julia. Il n’avait fait qu’une campagne en Espagne ; c’était précisément la même année, et dans le corps d’armée où servait le major Fitzgerald ; et sa conduite n’avait que trop prouvé depuis de quoi il était capable.

Mrs Fitzgerald pria son amie de lui dire quelle conduite elle devait tenir dans cette occasion ; celle-ci lui demanda si elle avait instruit lord Pendennyss de l’audacieuse visite de son persécuteur. À ce nom les joues de la jeune veuve se couvrirent d’une vive rougeur, et elle répondit que, quelque outrageantes, quelque peu méritées que lui parussent les viles insinuations d’Egerton, elles avaient fait naître dans son cœur une répugnance trop invincible pour avoir encore recours aux bons offices du comte. — D’ailleurs, ajouta-t-elle en baisant la main de Mrs Wilson, vos bontés pour moi ne me rendent-elles pas inutiles tous les autres conseils ? Son amie, en lui serrant la main avec amitié, loua beaucoup sa délicatesse et lui dit que, quoique le noble caractère de Pendennyss fût à l’abri du plus léger soupçon, une jeune femme ne devait accorder sa confiance qu’à une personne de son sexe, si elle voulait éviter la censure du monde.

Comme Egerton était marié, il était probable qu’il ne chercherait pas de sitôt à tourmenter Mrs Fitzgerald, et elle avait le temps de prendre un parti ; Mrs Wilson espérait d’ailleurs que l’expectative de la fortune de M. Jarvis serait un motif assez puissant pour le retenir dans de justes bornes. Le marchand était vif, décidé ; il ne se laissait pas facilement abuser, et le plus simple soupçon de la vérité le mettrait bientôt du parti de l’opprimé, contre celui qui s’était fait son gendre.

Les dames ne se séparèrent qu’avec la promesse de se revoir le plus tôt possible, car cette dernière conversation avait encore augmenté leur amitié et leur estime mutuelles.

Mrs Wilson était à mi-chemin de la demeure de Mrs Fitzgerald, lorsqu’il lui vint tout à coup dans l’idée de s’assurer, par les moyens qu’elle avait entre les mains, de l’identité du colonel Egerton avec le persécuteur de Julia. Elle tira le portefeuille de son sac, et l’ouvrit pour en examiner le contenu ; deux lettres tombèrent sur ses genoux ; elle jeta aussitôt les yeux sur l’adresse, qui suf-