Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/230

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Pendant ce temps sir Henry Egerton ne paraissait que rarement dans la famille de sa femme ; il avait sa société particulière, et il passait la plupart de ses soirées dans une célèbre maison de jeu. Cependant Londres devenait désert, et lady Jarvis et ses filles, après avoir en la condescendance d’aller faire des visites de cérémonie à leurs anciennes connaissances de la Cité, pour y faire étalage de leurs titres et de leurs nouvelles grandeurs, dirent à sir Timo qu’elles ne pouvaient tarder davantage à se rendre à Bath, et quelques jours après toute la famille y était établie.

Lady Chatterton était venue avec Grace habiter la maison de son fils. John Moseley les y avait suivies, plus heureux, plus épris que jamais ; et il reçut bientôt une lettre de son père qui le priait de lui retenir un logement pour lui et sa famille.

Lord et lady Herriefield étaient partis pour le midi de la France, et Catherine, éloignée de ses parents et des lieux où se rattachaient les doux souvenirs de ses premières années, se trouvant seule avec un homme qu’elle n’aimait point, pour lequel elle n’avait même pas d’estime, commença à sentir qu’un titre et une grande fortune ne suffisent pas pour assurer le bonheur.

Lord Herriefield était d’un caractère dur et naturellement soupçonneux ; mais la position de sa fille aînée ne donnait aucune inquiétude à la douairière intrigante, qui, croyant avoir tout fait pour elle en lui ménageant un si brillant mariage, s’applaudissait du résultat de ses manœuvres.

Une fois ou deux, l’habitude l’emportant sur la prudence, elle s’était efforcée de faire avancer de quelques jours l’époque fixée pour le mariage de Grace ; mais John avait pris aussitôt l’alarme, et son absence pendant vingt-quatre heures l’avertit du danger de blesser en aucune manière une susceptibilité poussée aussi loin.

Dans ces occasions John se punissait autant que la douairière ; mais le sourire de Grace lorsqu’elle le revoyait, sa main qu’elle posait franchement dans la sienne, ne manquaient jamais d’effacer l’impression désagréable que produisaient les artifices de la mère.

Les Chatterton et les Jarvis se rencontrèrent bientôt dans les assemblées, et l’épouse du baronnet, s’approchant de la douairière, avec ses deux filles, lui fit le salut le plus amical.

Lady Chatterton, qui ne se souvenait réellement pas de l’avoir vue à B***, rougissant de paraître connue d’une personne qui