Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/25

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— Et vous pouvez ajouter en même temps, Monsieur, si bon vous semble, dit sèchement M. Jarvis, qu’il est habité par un vieillard qui a fait des sermons toute sa vie, sans plus de fruit, je le crains bien, que la plupart des prédicateurs, ses confrères.

— Vous excepterez du moins notre digne hôte, Monsieur, dit Mrs Wilson en regardant le docteur Yves ; et voyant que sa sœur était blessée d’une familiarité à laquelle elle n’était point accoutumée, elle répondit à la question. Le père de sir William Harris avait le titre de doyen ; et quoique la maison fût sa propriété particulière, les habitants avaient coutume de l’appeler le Doyenné, et ce nom lui est resté depuis lors.

— N’est-ce pas une drôle de vie que mène là sir William, dit miss Jarvis, d’aller de ville en ville pour prendre les eaux, et de louer tous les ans sa maison comme il le fait ?

— Sir William s’occupe uniquement du bonheur de sa fille, dit le docteur Yves d’un ton grave, et depuis qu’il a hérité de son titre, il a, je crois, dans un comté voisin, une nouvelle résidence qu’il habite ordinairement.

— Connaissez-vous miss Harris ? ajouta la jeune personne en s’adressant à Clara, et sans attendre sa réponse : — c’est une merveilleuse beauté, je vous assure ; tous les hommes meurent d’amour pour ses beaux yeux.

— Ou pour sa fortune, reprit sa sœur en secouant dédaigneusement la tête ; quant à moi, je n’ai jamais pu rien voir de si attrayant dans sa personne, quoiqu’elle fasse beaucoup parler d’elle à Bath et à Brighton.

— Vous la connaissez donc ? dit Clara avec douceur.

— Mais… oui…, comme on se connaît dans le monde, répondit miss Jarvis en hésitant, tandis que ses joues se couvraient d’une vive rougeur.

— Que voulez-vous dire, Sarah ? — comme on se connaît dans le monde ? s’écria son père en éclatant de rire ; lui avez-vous jamais parlé ? Vous êtes-vous jamais trouvée dans le même salon qu’elle ? à moins que ce ne soit au bal ou au concert ?

La mortification de miss Sarah était évidente ; heureusement l’annonce que le dîner était servi vint mettre fin à son embarras.

Mrs Wilson ne laissait jamais échapper l’occasion de placer une leçon de morale lorsque quelque incident de la vie journalière pouvait y donner lien. — Ne vous exposez jamais, ma chère en-