n’hésitait jamais à obéir, et se permettait rarement de s’informer des motifs.
— Tout est prêt, Monsieur, le pont est nettoyé, dit M. Luff après avoir passé quelques minutes à exécuter les ordres précédents.
Ludlow sembla sortir d’une profonde rêverie. Il avait jusque-là parlé machinalement, plutôt qu’avec la conscience de ce qu’il disait, et sans que ses sentiments eussent aucun rapport avec ses paroles. Il devenait nécessaire qu’il se mêlât à ses officiers, et donnât des ordres qui, tenant moins à la routine, exigeaient plus d’attention et de prudence. Les équipages des différents bateaux reçurent l’ordre de partir, et on leur distribua des armes lorsqu’ils furent descendus ; on leur assigna des officiers, et on leur expliqua le devoir qu’ils avaient à remplir.
Dans la chaloupe du capitaine, un maître assisté de six matelots reçut l’ordre de ramer directement vers le Cove, et de mettre avant d’y entrer des paillets aux avirons. Il devait y attendre un signal du premier lieutenant, à moins qu’il ne s’aperçût que le brigantin tentait de s’échapper ; dans ce cas, il avait les ordres les plus précis de l’aborder à tout hasard. Le jeune brave n’eut pas plus tôt entendu ces paroles qu’il quitta le vaisseau et se dirigea vers le sud, se tenant en deçà de la langue de terre que nous avons si souvent nommée. Luff reçut ensuite l’ordre de prendre le commandement de l’espèce de chaloupe appelée launch ; avec ce pesant bateau, dont l’équipage était nombreux, il devait se rendre dans le passage, où il donnerait le signal à la chaloupe, et d’où il volerait au secours de cette dernière, aussitôt qu’il serait assuré que la Sorcière des Eaux ne pouvait s’échapper par le passage secret.
Les deux cutters furent placés sous le commandement du second lieutenant, avec ordre de se diriger entre l’extrémité du cap, ou le Hook, et cette île longue et étroite qui s’étend du havre de New-York à plus de quarante lieues vers l’est, protégeant toute la côte du Connecticut contre les tempêtes de l’Océan. Ludlow savait que, quoique les vaisseaux de gros calibre fussent obligés de passer près du cap afin de gagner la pleine mer, un léger brigantin comme la Sorcière des Eaux trouvait plus au nord une profondeur suffisante. Les cutters furent donc envoyés dans une autre direction, avec ordre de couvrir une aussi grande surface du canal que pos-