Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 11, 1839.djvu/114

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au service du Créateur que de la créature, murmura le moine.

— Il y en a, saint père, qui ont de l’admiration pour tous les deux. Je désirerais que tel fût le partage de celle qui est favorisée des conseils spirituels d’un homme aussi vertueux, aussi sage que vous. C’est ici que je mets ma fortune ; arrive que pourra. Je voudrais qu’il me fût permis d’y risquer un enjeu plus considérable.

En parlant ainsi, le cavalier offrait à la beauté silencieuse un bouquet des fleurs les plus belles et les plus fraîches, et parmi lesquelles on voyait celles que les poètes ont données pour attributs à la constance et à l’amour. Celle à qui cette offrande était adressée hésitait à l’accepter ; la réserve imposée à son sexe et à son âge lui permettait à peine de recevoir cet hommage, bien que la fête autorisât cette galanterie. Elle hésitait donc, avec l’instinct d’une jeune fille qui n’était pas encore familiarisée avec des hommages aussi publics.

— Recevez ces fleurs, ma chère, dit sa compagne avec douceur. Le cavalier qui les offre a simplement l’intention de montrer sa courtoisie.

— Nous le verrons plus tard, répondit vivement don Camillo ; car c’était lui. Adieu, Signora ; nous nous sommes déjà rencontrés sur ces ondes, et il y avait alors moins de contrainte entre nous deux.

Il salua, et, faisant signe à son gondolier, sa barque se perdit bientôt au milieu des autres. Cependant,-avant que les deux bateaux se séparassent, le masque de la jeune fille fut légèrement agité, comme si celle qui le portait eût cherché à respirer plus librement, et le Napolitain fut récompensé de sa galanterie par la vue du beau visage de Violetta.

— Ton tuteur a l’air mécontent, observa rapidement donna Florinda. Je m’étonne que nous soyons reconnues.

— Je m’étonnerais davantage si nous ne l’avions pas été. Pour moi, je pourrais reconnaître le noble Napolitain au milieu de mille autres cavaliers. Ne te rappelles-tu pas ce que je lui dois ?

Donna Florinda ne répondit pas ; mais elle offrit au ciel une fervente prière pour que le service du Napolitain pût tourner à l’avantage de celle qui en avait été l’objet. Elle échangea avec le carme un regard furtif et embarrassé ; mais comme ni l’un ni l’autre ne parlèrent, un long silence succéda à cette rencontre.

Cette société, ainsi que la foule joyeuse qui l’entourait, fut rap-