Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/143

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avez empêchée d’approcher. En faveur de ce don, je demande vos prières pour l’électeur, la ville de Duerckheim et la famille de Frey.

En disant ces mots, le bourgmestre piqua des deux, et fut bientôt au pied de la montagne de Limbourg. Les valets de pied, qui étaient restés en arrière pour être témoins des largesses du magistrat, s’étonnèrent de l’indifférence d’Emich, ce qui semblait peu naturel dans un homme placé par la Providence assez haut pour secourir les besoins du pauvre ; ils se disposaient à suivre leurs maîtres lorsqu’un frère lai toucha un de ces valets sur le bras, lui faisant signe de rentrer dans la cour.

— On a besoin de toi, mon ami, dit le frère à voix basse. Amuse-toi avec ces hommes d’armes jusqu’à ce qu’ils se retirent, puis entre dans les cloîtres.

Un signe apprit au frère lai qu’il était compris, et il disparut aussitôt. Le serviteur du comte Emich fit ce qu’on lui avait commandé, se promenant dans la cour jusqu’à ce que le projet de l’abbaye fût accompli, celui de montrer la protection que lui accordait l’électeur contre son dangereux voisin. Les arquebusiers se rendirent à leurs quartiers. Le chemin ne fut pas plus tôt libre que le paysan suivait les ordres qui lui avaient été donnés.

Dans tous les couvents de l’ancien monde, il existe une cour intérieure, entourée d’arcades basses, appelées cloîtres. Cette expression, qui désigne la solitude de la vie monastique et le but de l’institution elle-même, s’applique seulement, dans un sens architectural, aux arcades sombres et solitaires dont on vient de faire mention. Lorsque cette partie du bâtiment est embellie, comme il arrive souvent, par des ornements d’un style gothique, on ne peut imaginer un lieu plus propre à la réflexion, à l’examen de soi-même et à un calme religieux. Quant à nous, les cloîtres nous ont toujours paru remplis de la poésie de la vie religieuse ; et, bien que protestant, nous n’entrons jamais dans un cloître sans ressentir l’influence de ce sentiment, qu’on croit être excité par la solitude d’un couvent. En Italie, la terre des pensées poétiques et des glorieuses réalités, les pinceaux des plus grands maîtres ont prêté aux cloîtres les séductions de l’art, mêlées de leçons instructives en harmonie avec leur usage. C’est là qu’on trouve les plus beaux tableaux de Raphaël, du Domi-