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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/226

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trône, revêtu de sa mitre et d’habits couverts d’or. Il eût été possible à un œil observateur et hostile de découvrir sur quelques visages fatigués, dans quelques yeux appesantis, une grande envie d’aller retrouver un bon lit, ou peu de goût pour les offices ; mais aussi plus d’un moine accomplissait son devoir par zèle et par conviction. Parmi ces derniers on distinguait le père Arnolph, aux traits pâles, à l’œil pensif. Il était assis dans sa stalle, regardant les préparatifs avec la tranquille patience d’un religieux habitué à chercher son bonheur dans les devoirs de son état. On aurait pu lui opposer, comme contraste, le père Johan, au visage inquiet et sévère plutôt que mortifié ; ses regards erraient précipitamment de l’autel et de ses riches décorations à la place ou l’anachorète se tenait à genoux, comme s’il eût calculé à quel degré d’humiliation et d’amertume il était possible de réduire l’esprit contrit du pénitent.

Odo von Ritterstein, car nous n’avons plus aucune raison de refuser à l’anachorète le nom qui lui est dû, s’était placé près de la balustrade, non loin du chœur ; il était à genoux, les yeux fixés sur le vase d’or contenant l’hostie qu’il avait jadis outragée, offense qu’il venait expier autant qu’il était en lui. La lumière n’éclairait que faiblement sa taille, mais elle servait à rendre plus visible chaque sillon que les chagrins et les passions avaient creusé sur son visage. Ulrike l’étudiait avec intérêt dans une circonstance si pénible ; et, tremblante, elle était aussi agenouillée près d’Ilse, de l’autre côté de la petite grille qui servait de communication entre l’église et le chœur. Dans ce moment Gottlob se glissa à travers les colonnes et vint se mettre à genoux sur les dalles de la grande nef. Il venait assister à la messe, comme à une cérémonie à laquelle chacun a le droit de se rendre.

La lumière était si vive autour de l’autel, et il régnait une obscurité si grande dans le reste de l’église, que ce ne fut pas sans difficulté que Boniface put s’assurer de la présence de celui pour lequel on offrait le saint sacrifice. Mais lorsque, après avoir contracté son front de manière à former, avec ses épais sourcils, une espèce de rempart contre la lumière, il lui fut possible de distinguer les traits d’odo, il parut satisfait, et fit signe de commencer le service.

Il est inutile de répéter les détails d’une cérémonie que nous avons déjà essayé de décrire dans cette histoire ; mais la musique