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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/243

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traces d’une orgie récente, enfin cette odeur repoussante qui caractérise une caserne mal tenue ; mais nulle voix ne répondait à la leur ; nulle épées, nulle arquebuse ne se préparait à repousser leurs coups. La stupeur fut le premier sentiment qu’ils éprouvèrent en constatant ce fait important. Alors Heinrich et Berchthold donnèrent l’ordre d’amener le portier qu’ils avaient fait prisonnier.

— Explique-nous ce mystère, lui dit le bourgmestre d’un ton d’autorité ; que sont devenus les hommes d’armes du duc Frédéric ?

— Ils sont partis à l’entrée de la nuit, grand magistrat, laissant Limbourg sous la garde de son saint patron.

— Partis ! comment ? et pour aller où ? Si tu me trompes, drôle, ton saint Benoît lui-même ne t’empêchera pas d’être étrillé d’importance.

— De grâce ne vous mettez pas en colère, car je ne dis que la vérité. Au coucher du soleil, il est arrivé un ordre de l’électeur, qui rappelait jusqu’au dernier de ses hommes d’armes ; car il est serré de près, à ce qu’on dit, et il a grand besoin de secours.

Le silence qui suivit cette explication fit bientôt place aux acclamations les plus bruyantes, et quelques individus commencèrent à se détacher furtivement du corps principal pour satisfaire leur désir de pillage.

— Et quelle route ont-ils prise ?

— Ils sont descendus par le chemin pour les chevaux, en bon ordre et en silence, respectable Heinrich, et ils ont gravi la montagne en face pour ne pas donner aux bourgeois la peine d’ouvrir les portes à une heure aussi indue. Leur intention était de traverser les cèdres de l’Heidenmauer, et, descendant de l’autre côté du Camp, de gagner la plaine derrière Duerckheim.

Il ne restait plus de doute que la conquête ne fût achevée, et la troupe tout entière se débanda, les uns pour exécuter les ordres particuliers qu’ils avaient pu recevoir, les autres, comme ceux qui avaient déjà pris les devants, pour s’occuper de leurs propres intérêts.

Jusqu’à ce moment aucun maraudeur ne s’était approché de la chapelle. Comme ceux qui avaient dirigé l’attaque ne désiraient point qu’il fût fait personnellement aucun mal aux saints frères, les dispositions avaient été concertées de manière à laisser pen-