CHAPITRE XVI.
andis que les mascarades que nous venons de décrire continuaient
sur la grande place, Maso, Pippo, Conrad, et tous ceux
qui se trouvaient compromis dans le tumulte qu’avait fait naître
l’affaire du chien, rongeaient leur frein dans les murs de la maison
d’arrêt. Vevey renferme plusieurs places ; et les cérémonies
variées des dieux et des demi-dieux devaient être répétées même
sur les plus petites. Une de ces dernières se trouve devant l’Hôtel-de-Ville
et la prison. Les coupables en question avaient été sur-le-champ
transférés à la geôle, sur les ordres de l’officier chargé
de la police. Par un acte de bonté, bien approprié au jour et au
genre de l’offense, on permit aux prisonniers d’occuper une partie
de l’édifice dont la vue donnait sur la place ; ils ne furent pas
ainsi tout à fait exclus de la joie générale. Cette faveur avait pour
condition qu’ils cesseraient toute dispute, et se conduiraient de
manière à ne plus troubler un spectacle qui était l’objet de l’orgueil
de tous les Veveysans. Tous les prisonniers, les innocents
aussi bien que les coupables, souscrivirent avec joie à cet arrangement ;
car ils se trouvaient dans un lieu où tout argument sur
le mérite personnel ne pouvait être admis ; d’ailleurs le meilleur
des niveaux est une commune infortune.
La colère de Maso, que la chaleur de son sang rendait soudaine et violente, se changea bientôt en une tranquillité qui était probablement plus en rapport avec son éducation et ses sentiments, points sur lesquels il était bien supérieur à son antagoniste. Le mépris effaça bien vite toute trace de ressentiment ; et, quoiqu’il fût trop habitué à de rudes contacts avec des hommes de la classe du pèlerin, pour être honteux de ce qui était arrivé, il s’efforça